L’Europe face à la Chine : le cas allemand (BRET-France Culture)

Alors que la Commission européenne s’apprête à publier une nouvelle doctrine stratégique vis-à-vis de la Chine, un pays membre pourrait se placer au centre de ces bouleversements géopolitiques : la première économie du continent, l’Allemagne.

La publication des deux rapports a été retardée à plusieurs reprises, mais elle devrait intervenir avant la fin du mois à peu près au même moment : la Commission Européenne doit proposer aux Etats membres une nouvelle stratégie commune face à la Chine, et Berlin doit préciser sa conception de la sécurité nationale au regard des bouleversements économiques et géopolitiques du moment. Guerre en Ukraine, confrontation musclée entre les Etats-Unis et la Chine, ambitions industrielles et offensives technologiques de la part de Pékin – les Européens n’ont plus guère le choix. Même si leur union a été conçue au départ comme l’organisation d’un vaste marché ouvert, les illusions de la mondialisation heureuse se sont dissipées et font place aux contradictions croissantes entre interdépendance commerciale et sécurité de tous ordres – à commencer par la sécurité économique.

C’est bien cette dimension-là, imposée par les leçons du Covid comme par les besoins de la guerre, qui bouleverse la perception des intérêts nationaux et européens. Jusqu’où sont-ils partagés ? Tout à son ambition d’une Commission géopolitique, Mme Von der Leyen veut selon sa formule « dérisquer sans découpler » – imposer des règles du jeu plus équitables avec Pékin sans céder aux pressions de Washington qui durcit le ton et les sanctions pour freiner le renforcement technologique de la Chine. L’importance du soutien militaire offert à l’Ukraine et à l’Europe, et les mesures protectionnistes américaines tiennent lieu d’argument. La puissance de l’Allemagne, première économie du continent, mais aussi sa dépendance vis-à-vis du marché chinois met Berlin en première ligne. Le Chancelier Scholtz organise bientôt un sommet bilatéral, germano-chinois, où il ferait cavalier seul. Serait-ce un différend de plus avec Paris, ou au contraire partage-t-il avec Emmanuel Macron l’idée que la Chine demeure un partenaire stratégique et global et qu’il faut éviter échapper à l’engrenage de la rivalité sino-américaine ? Au-delà des exercices d’équilibrisme auxquels doivent se livrer les dirigeants européens, comment ces enjeux décisifs sont-ils perçus par nos opinions publiques ?

J’étais l’invité d’Affaires étrangères sur France Culture avec Marie Krpata, chercheuse à l’IFRI, François Chimits économiste au CEPII, Shahin Vallée chercheur au Deutsche Gesellschaft für Auswärtige Politik (DGAP) et Philippe Le Corre Chercheur au Asia Society Policy Institute.

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