Géopolitique de l’Intervision 2025 : l’échec du soft power de Poutine (BRET-PARMENTIER-GC)

Tout le monde connaît l’Eurovision, concours de chansons diffusé en direct depuis 1956 qui fêtera ses soixante-dix ans l’année prochaine à Vienne ; mais qui se souvient de son double socialiste, l’Intervision (Интервидение en russe) ? 

Né en Tchécoslovaquie dans les années 1960 et interrompu par la répression soviétique du Printemps de Prague, repris dans la Pologne des années 1970, le concours a disparu avec la fin de la Guerre froide car sa vocation était de célébrer le bloc de l’Est, son dynamisme et sa diversité.

Symbole d’un changement d’ère, la Russie avait tenu à intégrer le concours de l’Eurovision dès 1994.  Oubliant l’Intervision communiste, elle avait consacré tous ses efforts à l’Eurovision, l’avait même remporté avec Dima Balan (2008) puis organisé à grands frais à Moscou (2009). L’invasion de l’Ukraine en 2022 a toutefois précipité son exclusion du concours ainsi que celle du Bélarus, marquant une rupture symbolique très visible avec l’espace culturel européen.

Le 20 septembre 2025, ce concours vient de renaître à la Live Arena près de Moscou, avec la victoire de Đức Phúc, candidat de la télévision publique vietnamienne. Il se déroule dans un contexte inédit : guerre avec l’Ukraine, suspension du comité national olympique russe, isolement diplomatique vis-à-vis de l’Europe et réorientation vers le Sud global. En accueillant des candidats venus de vingt-trois pays et notamment des BRICS, du Moyen-Orient, d’Afrique et d’Amérique, l’Intervision se veut désormais la vitrine culturelle d’un monde multipolaire et l’alternative civilisationnelle à une Europe accusée de décadence.

Au-delà du spectacle, il s’agit d’un véritable test grandeur nature : la Russie peut-elle, par décret présidentiel, fabriquer un soft powercapable de rivaliser avec le mainstream occidental?

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