Le G7 de Biarritz : le leadership par la surprise ? (PARMENTIER pour LCI et BFM TV)

La surprise était bien gardée : en début d’après-midi du dimanche 25 août, un avion iranien se dirige vers Biarritz. Puis on apprend qu’il comporte à son bord le Ministre des Affaires étrangères iranien, Mohammad Djavad Zarif, présent dans la capitale française le jeudi précédent. Passera-t-il au G7 afin de rencontrer les chefs d’Etat et de gouvernement présents ? On apprend que c’est une initiative de Jean-Yves Le Drian, mais avait-elle auparavant fait l’objet d’une discussion avec Donald Trump ? La visite de travail avec Jean-Yves Le Drian se déroule normalement, mais la Président français s’est joint à la fin de la réunion, avec des représentants européens, d’Allemagne et de Grande-Bretagne.

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Alors que le management exige de la prévisibilité, le leadership peut-il naître de la surprise ?

L’art du leadership réside dans la capacité d’un leader à entraîner un mouvement, à fédérer des énergies dans un sens donné. Par conséquent, le leadership est la rencontre d’un homme, d’une situation et d’un groupe.

L’organisation du G7 a été soignée : il a fallu bousculer le cadre d’un G7 qui n’a plus la même influence qu’il y a une quinzaine d’années. Et pour cause : les « sept pays industrialisés » comme on les appelait au cours des années 1970 pèsent désormais moins en parité de pouvoir d’achat que les BRICS (Brésil – Russie – Inde – Chine – Afrique du Sud). En rencontrant Vladimir Poutine en amont, le 19 août à Brégançon, en élargissant le format à d’autres pays invités, en ne focalisant pas l’attention sur le communiqué final, objet d’intenses négociations, les modalités de l’exercice ont évolué. La première priorité du Président organisateur consistait donc à mettre en ordre l’administration.

La situation du G7 est celle d’un Forum international annuel à présidence tournante, le Sommet final concluant d’autres Sommets thématiques qui ont eu lieu au cours de l’année. Ce n’est pas une organisation internationale, quand bien même de nombreuses organisations internationales ont été invitées. Le G7 fait partie de ces étapes internationales qui jalonnent l’année diplomatique : elle a pour but de tenter de résoudre les différentes crises internationales, au Moyen-Orient – Iran et Syrie -, en Europe – l’Ukraine, des tensions commerciales sino-américaines… La question des inégalités étaient prévues, l’Amazonie s’est hélas invitée du fait de l’actualité environnementale. L’effet de surprise a permis de se concentrer spécifiquement sur le cas iranien.

Le leadership se définit aussi par rapport à un groupe. Celui du G7 parait à la fois similaire – des démocraties développées – mais avec des dynamiques diverses – on se souvent, lors du Sommet de 2018, de l’étonnante photo où l’on voit Donald Trump en position fermée face aux autres participants. Donald Trump mène incontestablement sa propre partition, tandis que Boris Johnson concentre ses efforts sur le Brexit et sa propre politique interne. Et ce groupe était complété cette année de plusieurs invités, en premier lieu l’Inde.

La courte déclaration d’une page du G7 mentionne bien deux idées clés sur l’Iran : ne pas accepter sa nucléarisation, ne pas destabiliser la région. Dans ce contexte, la visite du Ministre iranien s’est avérée un pari gagnant : discuter en amont avec les dirigeants de G7, dont Donald Trump, initier un effet de surprise, puis le faire accepter par les participants, sur un texte si court qu’il est impossible pour un dirigeant de prétendre sérieusement ne pas l’avoir lu. En d’autres termes : pour être pertinente, la surprise doit être légitime et efficace. La diminution des tensions américano-iranien est un objectif légitime, l’efficacité sera confirmée par une rencontre américano-syrienne.

En conclusion : la surprise est un subterfuge de court terme, mais elle prend toute sa valeur sur un objectif de long terme. Pour cela, parler avec tout le monde et proposer des solutions est la clé d’une politique étrangère dynamique française, à condition d’exploiter ses autres forces profondes – au-delà de l’évidence européenne, la présence maritime mondiale de la France, la francophonie et les compétences diplomatiques.