Le n°100 du magazine Diplomatie est consacré au « Monde en 2050 ». Cyrille Bret y planche sur les trois scénarios d’évolution de la Russie à l’horizon 2050.
En 2024, à l’issue du quatrième mandat présidentiel de Vladimir Poutine, la Russie sera de nouveau à la croisée des chemins géopolitiques : soit achever son « pivot vers l’Asie » dominée par la Chine, au risque de la subordination ; soit reconstruire son influence dans les mondes slaves et post-soviétiques, au risque de l’isolement ; soit, enfin, rejoindre la famille européenne aujourd’hui honnie comme un repoussoir, au risque du revirement. D’ici à 2050, la Russie devra choisir son monde… et redéfinir son identité.
Après 2024, la Russie sans Poutine ?
Quand elle envisage son avenir, la Russie d’aujourd’hui a les yeux braqués sur 2024. Cette année-là, Vladimir Poutine achèvera son quatrième mandat à la présidence de la Fédération de Russie et célébrera sa vingt-cinquième année au pouvoir. A l’intérieur comme à l’étranger, tous s’interrogent sur l’après-Poutine. Aux termes de la Constitution actuellement en vigueur, le président russe ne sera pas rééligible. Toutefois, il sera âgé de 70 ans « seulement » et il n’a pas même commencé à préparer sa succession.
Pour considérer le « long futur » de la Russie, il faut nécessairement dépasser la fascination – négative ou positive – exercée par cette figure majeure de la scène internationale. En 2050, la Russie sera de toute façon sans Poutine. Elle n’en sera pas moins confrontée à des défis essentiels touchant à la diversification de son économie, à l’atonie de sa démographie, à la puissance des forces centrifuges, aux tensions avec l’Occident et, en dernier ressort, à son identité nationale.
Depuis le 19ème siècle, les destinées de la Russie sont débattues entre occidentalistes et slavophiles[1]. D’ici à 2050, la Fédération sera de nouveau placée devant des questions essentielles : son futur se joue-t-il en Asie de plus en plus dominée par la Chine (scénario 1) ? Son avenir passe-t-il par une voie spécifique, irréductible à l’Asie et à l’Europe, mais intimement liée aux mondes slaves et post-soviétiques (scénario 2) ? Ou bien son développement passe-t-il par l’intégration progressive à la famille européenne (scénario 3) ? Depuis 1991, les autorités russes ont alimenté l’ambiguïté en refusant de choisir entre ces options : après une période d’occidentalisation ressentie comme humiliante durant la décennie 1990, la Russie a redéveloppé sa puissance propre durant les années 2000 et a accentué son pivot vers l’Asie, notamment à partir de la crise en Ukraine, pour trouver des alliances de revers.
D’ici à 2050, la Russie doit choisir son monde… et définir son identité.
Trois scénarios sont ouverts :
- Un destin asiatique pour la Russie
- Un chemin proprement russe
- Un retour vers la famille européenne