C’est le nom que la presse moldave donne à l’oligarque Victor Gusan. D’abord parce que c’est le cofondateur du conglomérat d’entreprises « Sheriff » qui contrôle à peu près tout dans la République autoproclamée de Transnistrie, une région séparatiste pro-russe à l’est de la Moldavie, à quelques pas de la frontière ukrainienne, mais aussi parce que Victor Gusan y est un homme politique important. L’invasion du pays voisin par la Russie a tout de même déstabilisé ce milliardaire moldave. Fin avril, une série d’explosions a été entendue dans cette région soutenue par Moscou.
Ancien membre du KGB, Victor Gusan est forcément un homme très mystérieux. Sur internet, il n’y a qu’une seule photo de lui. Assis sur un fauteuil en cuir, au milieu d’un décor tout droit sorti de l’époque soviétique, cet homme de 60 ans a le visage sérieux et les sourcils froncés.
Un personnage à l’image d’une région nostalgique de l’époque soviétique, coincée entre l’Ukraine et la Dniestr, le fleuve local, qui aimerait devenir indépendante.
Ici, Victor Gusan a le monopole économique sur quasiment tout, selon Sabine Von Löwis, chercheuse au centre franco-allemand des études internationales et de l’Europe de l’Est : « C’est un entrepreneur très important en Transnistrie. Il a monté son empire commercial au début des années 90 en commençant avec de la contrebande. Il a fondé l’entreprise Sheriff. C’est un gros conglomérat avec pleins d’entreprises. Il avait de très bons rapports avec le président de la République autoproclamée Igor Smirnoff, ce qui l’a aidé à avoir un conglomérat de plus en plus gros. Smirnoff l’a aidé à racheter une chaine de supermarché, puis Gusan a racheté les chaines de télévisions, à créer une entreprise de télécommunication… »
Ces liens avec la politique ont pris de l’importance à mesure que son entreprise Sheriff a grossi. Il est estimé que Sheriff, et donc Gusan, contrôlerait plus de 60% de l’économie de la région, ce qui lui donne un pouvoir de décision important, selon Florent Parmentier, secrétaire générale du Centre de recherches politiques de Sciences Po et co-auteur du livre, La Moldavie à la croisée des mondes : « Victor Gusan fait un peu partie de ces hommes de l’ombre qui ont une importance sur le processus de décision politique. Monsieur Gusan tire les ficelles tout simplement parce qu’il est en mesure de capter une bonne partie des ressources de la République de Transnistrie. Capter des ressources en Transnistrie, ça veut dire être capable de mener un certain nombre de trafics avec des partenaires russes, ukrainiens, mais aussi moldaves. »
L’émission peut être écoutée ici.