On parle de « crise Covid » pour désigner la situation de pandémie liée à l’émergence de la maladie Covid-19 (coronavirus SARS-CoV-2), apparue à Wuhan le 16 novembre 2019. L’Organisation mondiale de la Santé a déclaré l’état d’urgence de santé publique de portée internationale le 20 janvier 2020, face à un bilan humain qui dépasse les trois millions de morts en avril 2021, date à laquelle ce chapitre est écrit.
Aussi, nous nous intéresserons ici moins aux effets géopolitiques de la pandémie qu’à la géopolitique de la vaccination. A titre liminaire, il nous faut donc distinguer le vaccin (produit de santé ayant pour but de procurer une immunité face au virus SARS-COV-2), les campagnes de vaccination (acte de vacciner massivement dans le but d’aller vers une immunité collective), et la vaccinologie (prise en compte de l’économie et la logistique de la vaccination). Le premier élément dépend des progrès médicaux, le deuxième d’une politique publique de santé (et de l’acceptation d’un acte intrusif sur des individus en bonne santé), le troisième de conditions économiques, logistiques et finalement géopolitiques.
En effet, la crise pandémique avait fait apparaître dans un premier temps « le pouvoir égalisateur du virus » (comme on dit de l’atome), les pays se trouvant, à des degrés divers, dans une situation de vulnérabilité aigüe face à un virus inconnu. Par contraste, la vaccination réintroduit une différenciation entre les pays, en fonction de qui parvient à trouver une solution médicale, à la produire, à l’administrer et à la faire homologuer par des autorités de santé. De ce point de vue, la vaccination reflète les tensions observables dans les relations internationales : accès aux ressources (les vaccins), importance de la recherche et développement, positionnement dans les chaînes logistiques de production, diplomatie sanitaire, politique d’influence et de prestige international… Au-delà de la matérialité des vaccins, la pandémie permet d’explorer des récits et des identités internationales des différents Etats.
Dans ce contexte, le groupe de Visegrad (Pologne, Hongrie, République tchèque, Slovaquie) a été à la fois témoin et acteur de l’émergence d’une Europe sanitaire, et l’enjeu d’une attraction et d’une répulsion pour le vaccin russe Spoutnik V, montrant une géopolitisation du débat.
Aussi, dans quelle mesure les enjeux de la vaccination ont-ils acquis une dimension géopolitique propre au groupe de Visegrad ?
Afin de répondre à cette question, il nous faut commencer par comprendre comment la vaccination est devenue une question géopolitique. Ensuite, il faut considérer l’émergence d’un acteur sanitaire européen à l’occasion de la crise, par le biais de la mutualisation des vaccins, dont les pays du groupe de Visegrad ont été témoins et acteurs. Enfin, l’arrivée du vaccin Spoutnik V dans le contexte de pénurie vaccinale permet de tester les relations des Etats du groupe de Visegrad avec la Russie.
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