La Moldavie résistera-t-elle à la guerre du gaz ? (PARMENTIER – France Culture)

Les Enjeux internationaux s’intéressent à la Moldavie après que le pays a subi une vaste panne de courant suite à des frappes russes contre les infrastructures énergétiques de l’Ukraine. La Moldavie résistera-t-elle à la guerre du gaz ?

Avec

  • Florent Parmentier Secrétaire général du CEVIPOF/ Sciences Po, chercheur associé au Centre de géopolitique de HEC.

Au sud-ouest de l’Ukraine et au nord de la mer Noire, la Moldavie a plusieurs fois vu passer des missiles russes tirés depuis des navires de guerre en direction de Kiev. Depuis le mois de février, sous les yeux des Européens, le pays apparaît bien comme étant à la croisée de deux mondes.

La présidente moldave Maia Sandu, pro-européenne élue en 2020 et dont le parti a aussi remporté les élections législatives de 2021, est sous la pression de Moscou. Elle qui a fait de la lutte anticorruption et de la désoligarchisation des structures étatiques ses combats principaux reste sur le qui-vive. Sa volonté d’engager la Moldavie dans un processus d’adhésion à l’Union européenne plaît d’autant moins que l’inflation galope en Moldavie, atteignant 35 %, le record du continent. Les prix sont gonflés par ceux de l’énergie, le mètre cube de gaz ayant connu sept augmentations depuis février dernier.

Une alternative coûteuse

30% des besoins d’électricité en Moldavie sont importés depuis l’Ukraine. L’une des difficultés du gouvernement actuel est de compenser ces approvisionnements mis à mal avec la guerre en Ukraine. La Moldavie s’est donc tournée vers la Roumanie, pays limitrophe avec qui elle entretient des liens de proximité culturelle et linguistique, jusqu’à devenir le fournisseur de remplacement, avec toutefois des prix bien plus élevés.

Le gaz comme arme de déstabilisation

La Moldavie dépend à 100% du gaz du géant russe Gazprom et fait l’objet de chantage sur plusieurs terrains diplomatiques à l’intérieur comme à l’extérieur du pays. Tout d’abord, Moscou cherche à diviser Kiev et Chisinau, la capitale moldave, en accusant l’Ukraine, pays de transite, de ne pas faire circuler de gaz russe destiné à la Moldavie. Moscou menace dans le même temps de couper les vannes.

Moscou cherche également à atteindre le pays de l’intérieur et exacerbe les failles de l’unité moldave. La Transnistrie, république autoproclamée à l’est de la Moldavie, consomme une partie du gaz transitant par l’Ukraine. Ce territoire séparatiste a contracté une dette importante auprès de Gazprom dont la Moldavie doit s’acquitter. La Moldavie, n’ayant aucun contrôle sur ce territoire, exige une négociation de cette dette. Enfin, la Transnistrie, occupée par 1500 soldats russes, abrite sur son territoire la seule centrale du pays, indispensable au fonctionnement énergétique de la Moldavie.

Selon Florent Parmentier, « la présidente Maia Sandu s’est clairement tournée vers l’Europe. Elle a fait de la lutte contre la corruption son cheval de bataille politique avec efficacité, car le contexte d’avant-guerre le permettait. Malheureusement pour elle, le contexte géopolitique la rattrape aujourd’hui, et sa majorité, et l’opinion publique. On voit que la polarisation a bien lieu. »

L’émission peut être écoutée ici.