La mission Villani : première étape d’un retour de l’Europe en matière d’IA ? (PARMENTIER pour Banque et Droit)

Le rapport Villani cherche à organiser une mobilisation de l’ensemble des acteurs français dans le secteur de l’intelligence artificielle (IA), pour affirmer un principe de souveraineté en la matière, mais sans se limiter à une vision franco-française réductrice. Celle-ci doit s’inscrire dans la réflexion plus large sur la souveraineté numérique de l’Europe.

« Donner un sens à l’intelligence artificielle : pour une stratégie nationale et européenne » : voici le titre de l’ambitieuse mission d’information confiée par le Premier Ministre au mathématicien et député de l’Essonne Cédric Villani. Largement médiatisé et suivi au plus haut niveau de l’Etat, avec la conférence de haut-niveau, #AIforHumanity du 28 mars 2018 au Collège de France, le rapport constitue une étape dans la mise en place d’une stratégie française et européenne en la matière.

Si, comme le souligne le rapport, « la discipline de l’IA s’est toujours développé de concert avec les imaginaires les plus délirants, les plus angoissants et les plus fantastiques »[1] (p.9), son auteur n’entend pas moins doter la France et l’Europe d’une stratégie réaliste en la matière, l’IA ne pouvant se penser dans un cadre strictement national. L’étude de ce rapport amène à faire le constat suivant : le résultat de ce travail amène à une mise en ordre de l’appareil d’Etat au sujet de l’IA, des orientations d’investissement et de la recherche plus généralement. Il amène à définir des buts (éviter de laisser la France dans une situation de « colonie numérique »), des valeurs (à définir autour des questions éthiques), des ressources et des capacités (à rapprocher de l’utilisation optimale des données), une structure et un système d’action (mettre en tension une volonté étatique s’appuyant sur un appareil d’Etat, tout en l’articulant avec les stratégies d’autres acteurs européens). Pour cela, la compréhension des opportunités et des menaces de l’environnement est une partie essentielle de cette stratégie, la confrontant aux actions des concurrents et potentiels partenaires, des grandes plateformes et des start-ups, des investisseurs et des chercheurs.

Toutefois, l’étude du rapport amène également à constater ses limites, il n’est en réalité qu’une étape nécessaire mais inaboutie sur le chemin de la construction d’un écosystème européen pouvant accompagner les start-ups dans leurs ambitions mondiales, leur permettre de s’insérer au mieux dans la chaîne de valeurs naissante de l’IA, de participer pleinement à la course technologique en mobilisant les meilleurs talents. Afin de réaliser la mise en œuvre de l’ensemble de ces objectifs, de prochaines étapes seront nécessaires.

[1] Cédric Villani, « Donner un sens à l’intelligence artificielle : pour une stratégie nationale et européenne », Mission confiée par le Premier Ministre Edouard Philippe. Mission parlementaire du 8 septembre 2017 au 8 mars 2018, p.9.

 

L’article est disponible dans son intégralité dans le hors-série la revue Banque et droit de septembre 2018.