C’est presque mathématique. La France et les vieilles puissances européennes auraient très peu de chance de remporter l’Eurovision. De nouvelles années de disette en perspective qui ne reflètent pourtant en rien le poids démographique des Big Five, les cinq grands du concours. Pourquoi ? Qui sont les vainqueurs d’aujourd’hui et de demain ? Questions à Florent Parmentier, géopoliticien et fondateur du site Eurasia Prospective.
TV5MONDE : pourquoi le groupe des Big Five – l’Angleterre, l’Espagne, l’Italie, la France et l’Allemagne – a actuellement très peu de chance de gagner à l’Eurovision ?
Florent Parmentier : il y a une raison essentielle. Nous sous-investissons le concours. Quand vous êtes une star de la chanson en Angleterre, la brit-pop vous permet de vous exporter. Si vous êtes Français, Italien, Allemand, vous avez des centres culturels à l’étranger qui vous permettent de commercialiser votre musique sur d’autres sols. Quand vous êtes Espagnol, assez naturellement, vous vous tournez vers le marché sud-américain et les États-Unis. Nous avons des affinités, des accointances avec d’autres espaces que l’Europe et ceux-ci nous permettent de développer notre marché musical. De ce fait, nous ne préparons pas suffisamment le concours et nous nous sous-investissons.
En revanche, si vous êtes un État de plus petite taille, ou de taille moyenne, gagner à l’Eurovision va vous permettre de gagner en visibilité au sein du pays pendant très longtemps. En clair, le champion s’il est Biélorusse ou Slovaque, aura une notoriété très forte dans son pays qui sera supérieure en termes de visibilité à celle d’un homologue allemand ou français. L’économie musicale de ces gouvernements est beaucoup plus tournée vers l’Eurovision. Elle les pousse à être plus compétitifs dans ce domaine que des grandes puissances.
TV5MONDE : la France, en particulier, accumule résultats moyens et défaites…
F. P : nous sommes à une période intéressante de notre histoire, puisque pour la première fois depuis le début de la cinquième République, nous avons un Président qui n’aura jamais connu de victoire française à l’Eurovision. La dernière date de mai 1977 et Emmanuel Macron est né en décembre 1977. C’est une anecdote, mais elle nous raconte quelque chose. La France a toujours eu tendance à considérer l’Eurovision comme un spectacle suranné, un peu kitsch, alors que d’autres États jouent pleinement le jeu. En ce sens, l’État français ne fait pas assez de communication et de lobbying à l’étranger pour vendre et faire connaître ses artistes avant le concours. Par ailleurs, pour les stars hexagonales, participer à l’Eurovision peut être plus coûteux qu’autre chose. La France est déjà un marché important et la nécessité de faire une carrière internationale ne se voit pas nécessairement rapidement.
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