COVID-19: géopolitique du monde qui vient (BRET – Diploweb)

Le monde d’après la crise COVID-19 est en gestation. En réalité il est partiellement déjà là. La catastrophe sanitaire et la récession économique ont d’ores et déjà accentué et modifié les rapports de force internationaux. Comme toutes les crises, celle que traverse le monde a non seulement avivé les rivalités latentes, révélé des transformations jusqu’ici occultées et créé de véritables ruptures. Alors même que la coopération serait la mieux à même de juguler l’épidémie, c’est la confrontation qui façonne la géopolitique du monde qui vient.Depuis décembre 2019, les fragiles équilibres internationaux sont secoués par trois crises majeures qui se sont succédé et qui s’amplifient désormais mutuellement. La première est sanitaire : par sa contagiosité et sa létalité, le virus du COVID-19 frappe les populations et pousse les États à restreindre les mouvements internes et externes. La seconde crise est économique : en raison de ces mesures prophylactiques, l’activité économique a drastiquement chuté au point que le FMI prévoit une récession mondiale d’au moins 3% pour 2020. La troisième est politique et stratégique car ces catastrophes sont devenues des enjeux d’affrontement entre puissances chinoise et américaine ou encore, à l’intérieur de l’Union européenne. En à peine trois mois, la face monde semble être profondément modifiée. Mais le « monde d’après » sera-t-il radicalement différent d’avant ou bien sera-t-il seulement « pire », comme l’a déclaré Jean-Yves Le Drian, le ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères ?

Les guerres mondiales, les krachs boursiers, les catastrophes naturelles et les révolutions ont ceci de commun avec les pandémies qu’elles peuvent bouleverser les rapports de force internationaux. Des hégémonies peuvent être mises à bas en quelques années, comme la domination de l’Europe sur le monde avait été balayée par la Première Guerre mondiale. De nouvelles puissances peuvent s’affirmer comme l’URSS qui était passé du statut de paria géopolitique à celui de superpuissance après la victoire contre l’Allemagne nazie en 1945. Les rapports de force peuvent se transformer et même s’inverser comme le poids de la République Populaire de Chine en Asie après la victoire de la révolution maoïste en 1949. Les grandes crises constituent des tournants géopolitiques car elles impriment un rythme bien plus soutenu aux évolutions amorcées ou lancées.

Fin avril 2020, la situation internationale est hautement évolutive : les perdants évidents et les gagnants probables ne sont pas encore connus avec certitude. Toutefois, plusieurs tendances géopolitiques sont perceptibles. Les trois crises actuelles ont déjà produit un triple effet sur les relations internationales : elles accélèrent et confirment des processus stratégiques en cours, notamment l’exacerbation de la rivalité sino-américaine (I) ; elles révèlent des tendances profondes mais encore inaperçues ou mal identifiées comme le tournant keynésien de l’économie (II) ; elles créent des ruptures, des fractures et ces césures véritables, au premier chef une pause dans la mondialisation (III).

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