De 2019 que retiendra-t-on ? Il est bien difficile de donner un unique fait marquant le plébiscite en faveur de Boris Johnson entérinant le Brexit restera probablement dans l’Histoire. En ces temps troubles pour l’Union Européenne, il est bon de rappeler qu’elle attire encore des pays. C’est le cas d’un Etat qui regagne une certaine popularité : la Serbie.
Au coeur des Balkans
A peine la frontière franchie, on se rend compte que nous sommes en plein monde slave par une chose qui ne trompe pas : le cyrillique. L’emploi majoritaire de cet alphabet est un marqueur fort de la culture serbe qui est centrée sur un autre pilier, l’Eglise orthodoxe. C’est la religion majoritaire en Serbie contrairement à ses voisins catholiques (Croatie, Hongrie, Slovénie). Ces deux piliers de la culture serbe sont également ceux d’une autre nation : la Russie.
La Serbie possède depuis des siècles une relation singulière avec la Russie par des liens historiques forts mais une aussi une proximité culturelle. Cette proximité s’exprima le plus fortement au moment où l’Empire Austro-hongrois déclara la guerre à la Serbie suite à l’assassinat de François-Ferdinand, la Russie ne recula pas en déclarant en retour la guerre au belligérant et le jeu des alliances aboutira au premier conflit mondial.
Au lendemain de la libération serbe par son peuple et les hommes de Franchet d’Esperey, à la fin de la « Der des Der », un nouvel Etat naquit : la Yougoslavie. La Yougoslavie qui comprenait la Serbie fut éphémère, elle sombra moins d’un siècle plus tard dans le sang emportant avec elle l’image lointaine de Pierre I et la réputation de la Serbie. Dans cette courte histoire, un Homme est particulièrement marquant, Josip Broz dit Tito. Il dirigea la Yougoslavie de 1945 à sa mort en 1980. Cet opposant à Hitler dans l’Europe occupée fut d’abord un agent soviétique qui a placé les pions de Staline en Yougoslavie. Au lendemain de la seconde guerre mondiale, une fois le pouvoir acquit Tito eut un objectif l’indépendance yougoslave. Bien que communiste il refusera de signer le pacte de Varsovie et jouera pendant toute sa vie à voguer le bloc de l’Est et de l’Ouest. Cette « neutralité » voire cette opposition vis-à-vis du Kremlin lui value les faveurs de la Maison Blanche et de l’Europe occidental. Mais ce n’est pas pour autant que les relations avec l’Occident furent simple. L’entêtement du leader yougoslave à aider les anciennes colonies européennes aspirant à l’indépendance ne se fit pas sans tensions avec les pays du vieux continent.
Après la mort de Tito la situation se compliqua jusqu’à aboutir à plusieurs guerres. Tant les conflits que les exactions commises ont conduit à la stigmatisation de la Serbie. Ainsi, quand le pays déclara son intention de rejoindre l’Union Européenne se fut d’abord un refus plus ou moins unanime mais la proximité géographique et la progressive coopération serbe dans les exigences européennes ont finalement conduit à l’acquisition du statut de candidat par la Serbie en 2011.
Le destin européen de la Serbie
Pourquoi accueillir un nouveau pays dans une Union qui connait pour la première fois le départ d’un de ses membres ?
D’abord l’adhésion de la Serbie serait logique culturellement, géographiquement et compte tenu des vagues progressives d’élargissement de l’Union Européenne. Ensuite en se consacrant sur le caractère slave de la Serbie ce serait un rééquilibrage vers l’Est de l’Union. Enfin et dans la logique de ce dernier point, l’adhésion de la Serbie pourrait être un élément d’une nouvelle dynamique. Celle d’une prise d’indépendance de l’UE vis-à-vis d’un allié américain de moins en moins certains et d’une considération nouvelle pour la Russie. La Russie est un interlocuteur inévitable pour notre économie, notre politique internationale, notre approvisionnement énergétique.
Cette Serbie au cœur de l’Europe a à sa tête un Président représentant parfaitement cette Serbie entre Atlantique et Oural : Alexandre Vucic. Il dispose depuis son élection (à 55% au premier tour) d’une légitimité totale et d’une habilité diplomatique notable qui font de lui un acteur probablement plus important que la couverture médiatique dont il dispose.
Maxime Boskov