L’opposition est-elle prête ? (PARMENTIER – Eurasia Prospective)

Depuis les présidentielles du dimanche 9 août, l’opposition conteste la victoire d’Alexandre Loukachenko, au risque d’affronter les forces de l’ordre. Qu’attendre de cette situation dans laquelle se trouve le pays ? Et surtout, quid de l’opposition ?

(1) L’attente des véritables rapports de force électoraux

Les premiers résultats remontés par l’opposition semblent contredire les résultats officiels (70% en faveur de Svetlana Tsikhanovskaïa). On peut certes avancer que les résultats de la capitale ne sont pas représentatifs du pays, mais sans doute plus que ceux de la commission électorale. Selon le vieil adage, « l’important n’est pas qui vote, mais qui compte le vote ». 

(2) Faire face à un appareil répressif

L’appareil répressif d’Etat biélorusse semble bien en place. Les arrestations pendant la campagne, au soir des élections et après renforcent cette impression. Les reportages montrent un recours disproportionné à l’usage de la force de la part des forces de l’ordre. Il faut dans ces conditions saluer le courage des manifestants, sachant très bien les risques qu’ils encourent.

(3) Après le dégagisme

Le dégagisme a été plus fort que la peur, ce qui est nouveau dans ces élections. Attention toutefois à ne pas sous-estimer les difficultés à venir. L’opposition est structurée à l’extérieur du jeu politique, n’a pas les relais économiques, administratifs, médiatiques ou politiques pour prendre la suite du pouvoir en place. 

Le “tout sauf Loukachenko” ne forme pas un programme politique, c’est un facteur de mobilisation pour une campagne électorale. La privatisation des entreprises mènera à une présence accrue du capital russe, à une période de crise économique majeure. Oui, e courage de Tsikhanovskaïa est indéniable, d’autant que son mari est derrière les barreaux. Elle refuse à juste titre de reconnaître les résultats officiels Après, quel programme proposer en dehors de la libération des prisonniers politiques et des élections libres ? Il n’y a pas d’unité là-dessus au sein de l’opposition, l’épreuve de l’exercice du pouvoir promet d’être difficile.

(4) Le dilemme à venir

Un dilemme moral se présente devant l’opposition : faudra-t-il juger Loukachenko et les généraux qui le soutiennent ? Ou bien leur trouver une porte de sortie qui permettra peut-être une transition politique rapidement et d’éviter de nouvelles répressions ? De cette question dépendra une partie du dénouement de la crise.